Non, non, non et non. Détrompez-vous, Luz n'a pas le plus petit gène hispanique en elle, même si son prénom s'applique à montrer le contraire! Et si vous remontez dans son arbre généalogique, vous verrez que le seul lien qu'elle a avec l'Amérique latine, est peut être la banane originaire du brésil qu'elle a mangé hier au déjeuner. Et qu'est ce qu'une banane vient faire dans son arbre généalogique? Ne me posez même pas la question. Donc non, Luz n'a jamais mis les pieds São Paulo et n' a strictement aucun lien de parenté avec Juan Carlos D'espagne.
Bon, dans un sens, il ne s'agit pas non plus d'une 100% wasp, bien au contraire: Le côté américain, elle le tient de son père, qui lui était un enfant du pays. D'ailleurs, Bill était connu à Haughton pour être l'excentrique de service. Ecrivain de son état, il ne faisait jamais rien comme tout le monde et ne manquait jamais de surprendre ses voisins...dans tous les sens du termes. C'est d'ailleurs ce qu'il fit lorsqu'il choisit de prendre Oksana comme compagne plutôt qu'une des filles de la ville. Une russe vous vous rendez compte? Et qui ne parlait pas un traitre mot d'anglais en plus!!...Ou quasiment pas...'Fin bon, ça revenait au même hein !
Ce n'est donc pas la peine de préciser que ce mariage mixte fut longtemps assez mal vue. C'est bien connue: Les russes sont toutes des croqueuses de diamants! Et n'oubliez pas que l'URSS était le GRAND ennemi des Etats-Unis etc...Mais vous savez, médire éternellement sur le dos des gens, au bout d'un moment..c'est lassant. Et puis, lorsque Oksana mit au monde quelques mois plus tard ses deux jumeaux les gens ne purent qu'admettre que c'était du sérieux entre le jeune couple.
Et ils vécurent heureux jusqu'à la fin des temps? Pas vraiment, non.
Luz fut la première des deux enfants à naitre. Surement est-ce pour ça qu'elle développa très vite un sentiment surprotecteur vis-à-vis de son frère qui lui, était un garçon plutôt chétif et extrêmement sensible. Elle, elle était un peu le rayon de soleil persuadée que tout allait toujours bien et qui souriait tout le temps, pour le rassurer...même si tout au fond d'elle, elle était consciente de son impuissance face à deux parents qui se hurlaient tout le temps dessus.

Bill avait un sale caractère. Oksana encore plus. Si à l'extérieur ils donnaient l'image d'une famille heureuse et soudée, au sein du foyer, ça ressemblait plus à Bagdad qu'à la petite maison dans la prairie. Il y avait encore de l'amour entre les deux mariés...mais la jeune russe détestait plus que tout Haughton. Trop petit! Trop campagnard! Trop ennuyant! La vie de mère au foyer, c 'était pas pour elle.
Alors un jour, elle en eu marre...et partie avec son fils. Oh, ce n'était pas bien grave. Des milliers de famille vivent chaque jour le déchirement du divorce avec son lot de séparation, de vacances partagés et autres contraintes. Une de plus ou de moins...Luz devait avoir un peu plus de huit ans quand elle comprit cela.
La petite blonde et son frère étaient inséparables et cela depuis leur naissance. C'est un phénomène fréquent chez les jumeaux certes, mais le lien qui les unissaient surprenaient toujours leur entourage. Alors, si vous lui demandez pourquoi elle choisit de rester avec son père malgré ce que cela impliquait, elle même sera incapable de vous répondre.
Peut être que malgré son jeune âge à l'époque, elle avait déjà compris que des deux, Bill serait celui qui aurait le plus besoin d'elle.
En effet, peu de temps après le départ de son épouse et de son fils, le jeune homme devint quasiment méconnaissable. Se refermant de plus en plus sur lui, perdant peu à peu toute joie de vivre, se plongeant de plus en plus dans l'écriture...c'est avec l'image d'un père là tout en étant absent que la jeune blonde grandi. Il l'aimait toujours, ça elle le savait...mais plus le temps passait, moins il arrivait à le lui montrer, se renfermant de plus en plus dans sa carapace.

C'était une situation assez frustrante pour une adolescente. Il ne s'agissait pas d'une crise à proprement parlé, mais plus d'une prise de conscience qui coïncida exactement avec « l'urbanisation » de Haughton. Plus de rencontres, plus de divertissements, des journées beaucoup plus intéressantes que celles passées enfermées chez elle au coté de son père...la transformation fut fulgurante ! 2 mots: Fêtarde invertérée. Dès qu'elle pouvait trouver un moyen de s'éclater elle sautait sur l'occasion sans penser aux conséquences. Ne fréquentant exclusivement que des nouveaux arrivants, à dix-sept ans, elle avait quasiment gouté à tout, se rapprochant de plus en plus de la limite vers la débauche. Après tout, on avait qu'une vie, et si son père était décidée à la gâcher, qu'il le fasse, ce n'était plus son problème. Ou du moins...ça, c'est ce qu'elle pensait...
L'an dernier, son père est mort. Personne ne sait où elle était à ce moment là. La vérité? Elle était en train de se saouler dans un bar avec sa meilleure amie.
Un AVC. Terrassé par un vulgaire AVC tandis qu'elle, elle était à son deuxième cocktail-cercueil. Ironique n'est ce pas?

La vie a suivit son cours, comme si de rien était. Il y a peu, sa mère et son frère se sont de nouveaux installés à Haughton. «Il est plus facile de surmonter une tragédie en famille » qu'elle a dit. Quelle famille? Ah, elle parle de l'espèce de lien sociale qu'ils sont en en train d'essayer de retisser? Ce ne sont que des mots! La vérité est que Luz est la seule à vivre avec la culpabilité de la mort de son père.

Si on devait choisir un adjectif pour définir Luz...c'est simple, on ne pourrait pas. Cette fille a beaucoup trop de facettes pour qu'un seul mot la décrive complètement. Pourtant, tous sont d'accord sur un point: Souriante. Si on lui donnait un dollar à chaque fois qu'elle affichait un sourire dans la journée sa fortune équivaudrait à plus ou moins cinq fois celle de la couronne d'Angleterre.
Être aimable, gentille et avenante semble être quelque chose de naturel chez elle. Mais attention, je dis bien « semble », car il y a plusieurs raison de se demander si l'image de petit ange rayonnant qu'elle donne n'est pas en réalité, un rôle murement et durement répété. D'une part parce que derrières ses allures douces et gentillettes, se cache parfois une véritable vipère. Pourquoi j'affirme cela? Parce qu'elle a un sale caractère! Insouciante, têtue, lunatique, susceptible et limite colérique, il lui arrive de s'énerver pour de simple broutilles qui sont pourtant sans importance.
Elle ne vous aime pas? Elle ne vous le montrera jamais explicitement mais vous le fera comprendre d'une manière ou d'une autre: Entre remarque blessante glissée au détour d'une phrase et sourire presque méprisant...Et ça bien sur, c'est lorsqu'elle est assez « bonne » pour avoir la décence de ne pas cracher dans votre dos. Oui, parce que, si il y avait une discipline « commérages » aux jeux olympiques, elle finirait surement sur le podium; c'est une pipelette et cela, dans tout les sens du terme.
Bon, le bon côté des choses c'est que au moins, vous ne risquez pas d'avoir un grand blanc dans une conversation avec elle. Il lui arrive même parfois d'être la seule à la faire.
Ce n'est pas tellement qu'elle aime se parler à elle-même, mais pour elle, être face à une idiote qui déblatère seule est moins inconvenant que de déjeuner dans un silence pesant. Ouai ouai, elle se qualifie elle-même d'idiote des fois.
On ne peut donc pas vraiment dire qu'elle se prend au sérieux, bien au contraire. Bonne vivante de nature, il fut un temps où l'on considérait qu'une fête sans elle était une fête par définition ratée.
Toujours prête à faire une connerie du moment qu'elle pouvait s'éclater...on peut dire qu'elle a beaucoup changé depuis. Pas comme si elle s'était assagie non, mais carrément renfermée.
C'est d'ailleurs l'autre raison qui pousse à se demander si son sourire perpétuelle n'est pas un masque qu'elle se plaque sur le visage pour faire croire que tout va bien.